Chères amies, chers amis, valeureuses accointances, vagues connaissances et agréables inconnus,
Vous le savez maintenant, un des seuls protocoles sociaux auquel Anima aime se prêter est celui des vœux du nouvel an. Certainement parce qu’on prend chaque mot de cette expression très au sérieux. Celui de « vœu », sortilège que l’on jette avec naïveté et sincérité comme une malédiction lumineuse sur leur monde de ténèbres ; ceux de « nouvel an », promesse d’un changement de paradigme qu’il devient de plus en plus urgent de précipiter, appelant désespérément cette aube nouvelle de tout notre être.
Anima vous souhaite à toutes et tous pas grand chose – mais d’un autre côté, c’est considérable – : On se souhaite de prendre dans nos bras quelqu’un qu’on aime et qui pense qu’on est merveilleux, même si (on le sait mais on ne le répète jamais assez) on n’a pas besoin d’être extraordinaire pour être aimé. Nous avons juste besoin d’être. Avec tous les efforts que cela implique pour traverser cet instant qu’on appelle notre vie en tentant de blesser le moins de personnes possible.
On l’avait déjà souhaité il y a quelques années, mais on réitère : on vous souhaite simplement de faire quelque chose. N’importe quoi. Autre chose. Rêver d’autre chose. Faire quelque chose autrement. Même si c’est une erreur. Surtout si c’est une erreur ! Car faire une erreur est la preuve qu’on a tenté de nouvelles choses, appris de nouvelles choses (car on apprend toujours plus de nos erreurs que de nos réussites). Il faut pousser un peu plus loin la question, ne pas se satisfaire de la réponse, poser de nouvelles questions (ou tout du moins sous une nouvelle forme que nous n’avions pas encore envisagée), faire des choses qu’on aurait jamais faites ou jamais oser faire. Faisons.
Tant que nous y sommes, on vous souhaite à toutes et tous d’être heureux, en bonne santé, de rire, que vous ne soyez plus jamais embêtés par des téléphones qui sonnent en indiquant un numéro inconnu ou entrant en provenance de Brazzaville. On vous souhaite de ne jamais rater une correspondance de train ou de bus. Et puisse votre valise toujours arriver la première sur le tapis roulant de l’aéroport, qu’une caisse s’ouvre immédiatement à chaque fois que vous vous dirigez vers la file d’attente dans un magasin, et qu’aucun de vos animaux domestiques ou de vos proches n’entrent en combustion spontanée.
Tout cela on vous le souhaite très sincèrement.
Mais par-dessus tout on se souhaite à toutes et tous de ne jamais s’arrêter, de continuer d’espérer, de ne pas s’inquiéter, de ne plus avoir peur.
Cesser d’avoir peur d’une pandémie, d’une guerre, d’un gouvernement tout aussi méprisant que méprisable, indécent, injuste et tyrannique. Rappelons-nous que nous sommes leurs douces erreurs et que nous vivons le gâchis qu’ils ont causé. Leur ambition bon marché de parvenus pathétiques est un virus qu’ils veulent nous inoculer. Refusons leur version du monde car c’est un récit de mort écrit par un patron stupide à la logique morbide et suicidaire. Un récit où les travailleuses et les travailleurs sont censés subir des années de peste sans récompense, encaissant encore plus de précarité. Refusons leur version du monde car leur version c’est la mort. La nôtre est dorée et vivante.
On se donne donc rendez-vous après le déluge. On se reverra quelque part, au bord de l’océan, à la nuit tombée. Nous y boirons encore une fois plus que de raison, mais cette fois, ça ne sera pas par désespoir. Ça ne sera pas pour chercher un quelconque réconfort, pas pour assouvir de primitifs besoins confondant affection avec ce qui n’est au fond qu’un mélange de réflexe social et de circonstances. Non. Ce sera pour trinquer et s’aimer, simplement éclairés par la lueur de leurs yachts en flammes, les yeux fixés vers le ciel, souriant en pensant que chaque étoile pourrait être un milliardaire qui s’asphyxie là-haut, prisonnier de leurs vaines fusées pour Mars qui ne reviendront pas. Réjouissons-nous.
D’ici là, on vous envoie comme toujours plein de tendresse, de force, de respect, d’amour et de magie.